Au début: un Zenit B noir et la Fête de l'Huma. (photographie)


 Mon premier appareil photo (vraiment à moi je veux dire) ne fut pas un Kodak Instamatic tout en plastique véritable comme pour nombre de mes camarades de collège qui s'en étaient vus offrir un à l'occasion de leur première Communion. Non, moi, j'ai dû attendre la fin de ma troisième, le BEPC et le début de l'été pour courir, argent en poche et l'appoint fait, chez Radio Pygmalion à Châtelet (qui ne vendait pas que des disques à ce moment là) m'acheter l'objet de mes rêves...: un Zenit B tout noir Made in USSR. C'était en juin 1973.
J'ai beaucoup appris avec cet appareil. Rustique, il n'avait pas de cellule. Aucune quelconque aide donc à en attendre pour faciliter mes premières prises de vue. Ce n'était pas facile, surtout pour un jeune débutant de bientôt 15 ans, mais cela a sans doute contribué à développer rapidement chez moi un instinct de la lumière, car par ailleurs, je n'utilisais pas non plus de posemètre à main. A force, cela finissait même par engendrer une sorte de relation un peu "charnelle", en tout cas une relation assez intime avec la matière elle-même de la pellicule, sa chimie. C'était exactement ce qu'il me fallait en définitive. Je devenais mon posemètre. Il n'y avait rien de mieux que cette privation d'assistance en guise d'apprentissage et je l'avais bien compris.

Aujourd'hui ça fait longtemps qu'il est en panne et qu'il ne prend plus une seule photo. Evidemment je pourrais le réparer comme je l'ai fait avec bien d'autres vieilleries mécaniques, mais je préfère qu'il en soit ainsi. Je le laisse à son silence. Je crois qu'il a bien mérité le droit de plus rien voir et de ne plus rien dire après toutes ces années.

Comme il faut bien commencer par quelque chose

A la fête de l'Huma, en septembre de la même année, au lendemain d'une première journée de concerts Pop et d'une nuit difficile passée au fond d'un tas de carton, je me suis réveillé sur cette scène cocasse et un peu symbolique peut-être de la gauche de l'époque... celle de son union toute fraîche mais aussi celle des regards plus interrogatifs que croisés entre générations de militants ou sympathisants du même bord.

Sans-titre - La Courneuve, Fête de l'Huma 1973, photographie - (c) René Bui
Sans-titre - La Courneuve, Fête de l'Huma septembre 1973, photographie - (c) René Bui

Mon bon vieux Zenit B noir de 1973 (c) René Bui
Mon bon vieux Zenit B noir Made in USSR de 1973 (c) René Bui

Sans-titre - La Courneuve, Fête de l'Huma septembre 1973, photographie (c) René Bui
Sans-titre - La Courneuve, Fête de l'Huma septembre 1973, photographie (c) René Bui


S'apprendre la photographie

 Puis la rentrée passée, débutèrent ces nombreux moments de solitude pour échapper au lycée, où la découverte pas à pas de son propre chemin procure une joie immense en même temps qu'elle effraie.

Double Auto-portrait - Banlieue parisienne 1973, photographie (c) René Bui
Double Auto-portrait - Banlieue parisienne 1973, photographie (c) René Bui



Roue Sur Le Toit - Banlieue parisienne 1973, photographie (c) René Bui
Roue Sur Le Toit - Banlieue parisienne 1973, photographie (c) René Bui


 
Bottes Abandonnées - Banlieue parisienne 1974, photographie (c) René Bui
Bottes Abandonnées - Banlieue parisienne 1974, photographie (c) René Bui



Fumée - Banlieue parisienne 1974, photographie (c) René Bui
Fumée - Banlieue parisienne 1974, photographie (c) René Bui



Chapeau Sur Le Lit - Banlieue parisienne 1974, photographie (c) René Bui
Chapeau Sur Le Lit - Banlieue parisienne 1974, photographie (c) René Bui



Sans-titre - Au funéraille de ma mère, banlieue parisienne 1974, photographie (c) René Bui
Sans-titre - funéraille de ma mère, banlieue parisienne février 1974, photographie (c) René Bui


 Ces premiers pas se déroulèrent et s'achevèrent dans la pénombre grandissante des heures sombres de l'automne. Et dans cette noirceur toujours plus opaque, je terminais d'occire mon enfance à grands coups de clic-clacs dans sa gueule jusqu'aux derniers jours de l'hiver. Ces journées glaciales qui finirent par signer la fin du premier acte dans un dénouement tragique.




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